Contrairement aux idées reçues, le Kama Sutra (ou Kama Soutra) n’est pas un guide des positions sexuelles. Ecrit vers l’an 300 par un prêtre indien, le Kama Sutra traite de nombreux sujets. Tels que l’amour, le couple, le savoir-vivre, le plaisir et, évidemment, la sexualité. Nous sommes donc loin d’un ouvrage uniquement composé d’images érotiques. Qu’y a-t-il dans le livre du Kama Sutra ?
CW : cet article est cis-centré. C’est-à-dire que nous parlerons d’hommes et de femmes, en fonction des organes génitaux. Pour la simple et bonne raison que le Kama Sutra est genré et que la plupart des études sur le sujet le sont également.
Le Kama Sutra n’est pas une dictionnaire de positions sexuelles
A l’origine, le Kama Sutra est un ouvrage religieux, écrit par Vâtsyâyana. Ce livre était destiné aux castes les plus élevées et comporte sept tomes. Dont le plus connu est celui qui traite de sexualité et d’érotisme. La faute à une mauvaise traduction (entendons « traduction choisie« ) en anglais. Nous sommes à la fin du 19ème siècle et Richard Burton, officier à la Compagnie des Indes Orientales, prend connaissance de l’ouvrage. Cet homme, amateur de littérature érotique, semble apprécier le livre dédié à la sexualité et à la sensualité. Malheureusement, il n’a pas su (ou voulu) retranscrire certains aspects de ce tome ainsi que les six autres. C’est ainsi qu’en 1883 paraît la première traduction anglaise du Kama Sutra.
De quoi parle vraiment le Kama Sutra ?
Le Kama Sutra comporte sept tomes et trente-six chapitres. Il a été écrit comme un manuel d’éducation à la vie affective et sexuelle. Il parle donc de beaucoup d’autres choses que de sexe. Techniquement, nous ne devrions pas parler du Kama Sutra (au singulier) mais des Kama Sutra (au pluriel). Bref, les Kama Sutra sont comme un guide à la fois spirituel et pratico-pratique. Nous y retrouvons :
- des questions générales sur le couple et la manière d’aménager son foyer ;
- des conseils sur le sexe. C’est le tome auquel nous pensons d’emblée avec les positions sexuelles. Mais il comporte aussi d’autres choses que les positions ;
- des conseils sur l’union entre deux personnes ;
- la manière de choisir son épouse ;
- les rapports sociaux (ou sexuels) avec les épouses d’autres hommes ;
- des informations sur les courtisanes ;
- des renseignements sur les arts de la séduction et les différentes médecines.
Alors, oui, les Kama Sutra parlent de sexe. Mais ils sont surtout un guide des arts du plaisir (au sens large du terme), pour avoir une vie épanouie. Ils sont aussi un guide pour un mariage réussi. Comment se disputer ? Puis se réconcilier ? Comment construire sa maison ?
Les différents plaisirs sexuels entre partenaires
Nous n’allons pas faire une étude approfondie des Kama Sutra. Car il existe de multiples ressources qui en parleront probablement mieux que nous. Nous nous focaliserons sur le livre qui retient le plus d’attention depuis des centaines d’années : le second, traitant des plaisirs sexuels. Loin d’être uniquement un manuel d’explications des positions sexuelles, ce livre nous explique qu’il existe différents types d’unions sexuelles et de désir. Il traite également de la manière d’embrasser, de mordre ou de caresser saon partenaire. Nous ne pouvons pas détailler tous les aspects de ce Kama Sutra (car cela prendrait une journée pour tout lire).
Mais nous pouvons résumer grossièrement ce que Vâtsyâyana expose dans ces chapitres :
- Les types d’unions sexuelles basées sur la taille des organes sexuels :
- Lièvre, Taureau et Cheval pour l’homme, suivant la taille de son pénis (le Lingam),
- Biche, Jument et Éléphant pour la femme, suivant la profondeur de son vagin (le Yoni) ;
- Les types d’unions sexuelles basées sur la force du désir de chacun·e : Petite, Moyenne et Intense. Chez les hommes, par exemple, la force du désir serait liée à son désir sexuel ;
- La manière d’exprimer son amour pour une autre personne. Ainsi que les types d’expressions de l’amour ;
- L’art du baiser. Notamment, les endroits où il est autorisé de donner un baiser (lèvres, front, joues, seins, etc.) ou encore l’intensité avec lequel il est donné ;
- La manière de marquer saon amant·e, avec ses ongles. Quels types de marques, en fonction de leur forme ? Où suis-je autorisé·e à laisser des marques ? Dans quelles circonstances est-ce acceptable ? On y parle aussi de la qualité des ongles ;
- La façon de mordre saon partenaire. Ainsi que les qualités requises pour considérer que les dents sont acceptables. Quels types de morsures ? Quels endroits pour une morsure ? Comment réagir à la vision d’une morsure ? ;
- Les manières de frapper (pour le plaisir sexuel de chacun·e) et d’émettre des sons. Quels sont les endroits où frapper ? Quels sont les différents sons et cris qu’il est acceptable de pousser ? Et un rappel que chaque coup donné par l’un·e peut être rendu par l’autre ;
- La manière d’entamer et finir un acte sexuel ;
- La façon de se disputer en couple ;
- Les positions sexuelles ainsi que tout un chapitre sur le sexe oral. C’est souvent à ces chapitres que nous pensons lorsque nous parlons du Kama Sutra.
Dans tout ce livre, Vâtsyâyana précise bien que chaque acte fait à l’autre peut être rendu. Si l’un·e marque l’autre de ses ongles ou en le·la frappant, la réciproque doit être possible. Bref, ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse !
Les positions sexuelles et le sexe oral
Même si les Kama Sutra parlent de bien d’autres choses que le sexe, ils sont connus pour l’un de ces livres : celui qui contient les positions sexuelles. Nous sommes loin d’un livre avec des images pornographiques puisque l’ouvrage d’origine n’en contenait aucune. Avec les différentes traductions (plus ou moins récentes) de ce livre, sont venues s’ajouter des illustrations des positions sexuelles présentées.
Position sexuelle et plaisir
Dans ce Kama Sutra, l’acte sexuel est appelé congrès. Cela désigne la manière qu’un homme a de pénétrer une femme (oui, le Kama Sutra est hétérocentré). Les positions sexuelles sont présentées en fonction de la taille des organes génitaux, notamment. Elles sont décrites de manière à ce que le plaisir de chacun·e des partenaires soit à son maximum. Les noms de ces positions ne nous sont pas forcément connues. Mais certaines le sont. Comme la position du lotus, par exemple, qui permet une grande intimité entre les deux amant·e·s. Chaque position est donc décrite pour que chaque partenaire ait le plus de plaisir possible. A noter que de nombreuses positions portent le nom d’animaux. Et qu’il est du devoir de chaque partenaire d’imiter au mieux cet animal.
Les rôles de chacun·e
Le rôle de la femme dans l’acte sexuel est également décrit. Vâtsyâyana met en avant le pouvoir que la femme a sur l’homme en matière de sexe (mais pas seulement) ainsi que leur autonomie sexuelle. Car il est tout à fait autorisé de se masturber pour une femme, en l’absence de son époux ou si celui-ci ne l’a pas satisfaite sexuellement. Car le Kama Sutra insiste sur l’obligation de l’homme est de donner satisfaction à son épouse et décrit les techniques de masturbation mutuelle ou en solo.
Puisque la femme a un certain pouvoir sexuel, elle est autorisée à prendre les devants pendant l’acte sexuel. Vâtsyâyana décrit la manière dont elle peut prendre le pouvoir et ce qu’elle autorisée à faire. Il appelle cette prise de pouvoir l’échange de rôles. Cet échange de rôles montre l’amour et la passion que la femme éprouve pour l’homme. Mais ces « détails » ont été omis dans les premières traductions de ce livre du Kama Sutra.
Le livre traite également du sexe oral. Comme pour tout le reste, il y est décrit les différentes manières de faire (avec leurs petits noms). Les pratiques de sexe oral semblent assez encadrées par tout un tas de règles, qu’il serait trop long d’énumérer. Généralement, les personnes de haut rang et l’aristocratie ne doivent pas donner de fellation ou de cunnilingus sauf en des circonstances très précises.
Le Kama Sutra n’est donc pas qu’un livre de cul. D’ailleurs, il n’y a pas un mais des Kama Sutra. Ces Kama Sutra comptent sept livres, traitant de multiples sujets du couple et de la vie citoyenne. La partie consacrée aux relations sexuelles ne représente qu’un seul livre d’une cinquantaine de pages (sur environ 250 au total). Le Kama Sutra tel que nous l’imaginons aujourd’hui est assez loin de l’ouvrage originel. Il a été modifié par les nombreuses traductions qu’il a subies. Ainsi que par le choix qu’ont fait certaines personnes de ne pas mentionner certains passages. Retenons qu’à l’origine, les Kama Sutra sont le guide d’une bonne vie et d’un savoir-vivre, à destination des aristocrates.