Peut-être est-ce dû au manque d’éducation sexuelle reçue ou au tabou autour de la sexualité, les mythes sur la sexualité sont nombreux. Et ils ont la peau dure. Il nous semble important de pouvoir déconstruire toutes les fausses idées sur nos vies intimes. Cela nous permettra de nous reconstruire une sexualité plus sereine et bienveillante, loin des clichés et de la recherche de performance.
L’hymen est un gage de virginité
Remettons l’église au milieu du village : il n’y a pas un seul type d’hymen mais plusieurs ! L’hymen est cette fine membrane qui recouvre partiellement l’entrée vaginale. Elle sépare le vagin et la vulve et est généralement perforée. Certaines personnes naissent sans hymen et d’autres avec un hymen qui obstrue complétement l’entrée du vagin (hymen imperforé). Dans ce dernier cas, une opération est nécessaire pour que le sang des menstruations puissent s’évacuer naturellement. Il existe autant d’hymen que de personnes à vulves : chacun·e est unique.
Est-ce que l’hymen se déchire toujours ?
L’hymen peut se déchirer de multiples façons : en mettant un tampon, en utilisant un sextoy en pénétration vaginale ou lors d’activités sportives (l’équitation, la gymnastique, la boxe, le vélo, etc.). Et évidemment, lors d’une pénétration vaginale par un pénis, l’hymen peut également se déchirer.
Sauf que certains hymens sont dits complaisants. C’est-à-dire que la membrane est particulièrement élastique. Elle va se déformer, se dilater mais sans jamais se rompre. Certaines personnes auront donc toujours un hymen intact, même en ayant une vie sexuelle active. La déchirure de l’hymen n’est donc pas un gage de virginité.
Donc cessons de croire qu’être vierge c’est avoir un hymen intact. Et cessons de croire que « la première fois » n’est valable que s’il y a une pénétration vaginale. Il y a plein de premières fois et des tas de pratiques sexuelles !
La première fois fait mal et fait saigne
Ce mythe de la sexualité est en lien avec le précédent : la déchirure de l’hymen ferait mal et saignerait. Comme nous l’avons dit juste au-dessus, l’hymen peut s’être déjà rompu ou être particulièrement souple. Donc la douleur ne vient pas de la déchirure de l’hymen mais plutôt de son absence de souplesse. D’ailleurs, certaines personnes ont des hymens peu souples et ont alors des douleurs à la pénétration, à chaque rapport sexuel.
Lorsque l’hymen est déchiré (peu importe la cause), il n’y a pas forcément de sang. Chaque hymen est plus ou moins vascularisé. Si l’hymen comporte beaucoup de vaisseaux sanguins, il saignera effectivement plus. Mais ce n’est pas systématique.
Si ça fait mal, c’est que c’est mal fait
Tout d’abord, cela sous-entend que la première fois est forcément un rapport sexuel pénétratif. Mettons de côté les personnes non hétérosexuelles et les pratiques non pénétratives. Il existe de nombreuses manières d’avoir son premier rapport sexuel et ce, sans pénétration.
Ensuite, cela contribue à l’idée que, parfois, c’est normal d’avoir mal. A aucun moment un rapport sexuel ne doit faire mal : si ça fait mal, c’est que c’est mal fait ! Si la première pénétration fait mal, c’est souvent lié au manque d’expérience, de communication ou de lubrification des partenaires. Pour pallier à ce dernier problème, l’utilisation du lubrifiant devrait être beaucoup plus généralisé.
Relation sexuelle = préliminaires + pénétration + éjaculation
La fameuse triplette qui valide une relation sexuelle. Il faut commencer par des préliminaires, c’est-à-dire (souvent) du sexe oral : fellation et cunnilingus parfois. Ensuite, il y a pénétration vaginale (pif paf pouf). Et le grand final : l’éjaculation ! Déjà, (pas) merci l’hétéronormativité. Ce cliché du rapport sexuel « réussi » peut être décortiqué en plusieurs autres mythes.
Les préliminaires sont peu importants lors d’une relation sexuelle
Littéralement, le mot préliminaires signifie « qui précède et prépare à une chose considérée plus importante ou principale« . Cela veut donc bien dire que la pénétration semble plus importante que toute la phase d’excitation, de montée du désir et de plaisir. Sauf que, pour la majorité des personnes, cette phase de « préliminaires » est très importante. Elle permet de se mettre dans le bon état d’esprit, de faire monter l’excitation et le désir. Mais aussi de se faire du bien ! Le plaisir est tout de même l’un des buts recherchés dans une relation sexuelle.
Il existe plus d’une manière de faire des préliminaires : caresses, masturbation mutuelle, massage, baisers, etc. Et si nous prenions le temps de nous caresser et nous explorer ? Sans se mettre la pression ! Si la relation sexuelle s’arrête là et bien… Ça reste une relation sexuelle ! Vous avez pris du plaisir à deux (ou plus, nous ne sommes pas là pour juger) et c’est le plus important !
Il faut bander pour faire du sexe
Une fois les préliminaires terminés, il faut passer à la sacro Sainte Pénétration. Ou « comment mettre la pression pour avoir une érection« . Déjà, cela met la pénétration au centre de la relation sexuelle, mettant de côté toutes sortes de pratiques non pénétratives et certaines orientations sexuelles. Mais cela met aussi (et surtout) la pression à la personne ayant un pénis car l’érection ne se contrôle pas toujours. Elle survient lorsqu’un ensemble de facteurs sont réunis. Et ces facteurs peuvent changer d’une personne à une autre.
Faisons un tour rapide de ce qui peut influer sur le fait d’avoir (ou non) une érection :
- le désir sexuel. Parfois la libido n’est pas toujours au RDV. Parce que nous sommes fatigué·e, stressé·e, malade ou juste parce que la libido varie ;
- un·e nouvelle·eau partenaire. La première fois que nous découvrons le corps de quelqu’un ou que nous nous mettons nu·e devant une nouvelle personne peut parfois être stressant. Cela peut faire partie des injonctions concernant nos corps et nos sexualités : devoir ressembler à tel corps ou faire telles pratiques ;
- l’état de santé. Certains problèmes médicaux peuvent entraîner des difficultés à tenir une érection, comme le diabète ou la dépression. Dans le cas de maladies de longue durée, des facteurs psychologiques peuvent venir s’ajouter ;
- la prise de certains médicaments. Certains traitements peuvent affecter la capacité à avoir ou à maintenir une érection. Par exemple les antidépresseurs ou les médicaments pour certaines maladies cardiovasculaires.
Il s’agit d’une liste non exhaustive de ce qui peut influencer l’érection. Mais tu comprends bien qu’avoir une érection n’est pas que mécanique. Et si toi ou taon partenaire n’a pas d’érection, ce n’est pas grave : continuez à vous caresser et à vous câliner. Faites comme vous voulez, du moment que ça vous convient à tous·tes les deux !
L’éjaculation est synonyme d’orgasme
Vous prendrez bien un peu d’orgasme pour finir ? Ou une éjaculation ? Enfin… C’est la même chose non ? Et bien non Ninon !
Reprenons les bases :
- l’éjaculation est un phénomène mécanique et biologique. Elle survient après une excitation sexuelle du pénis et correspond à l’expulsion du sperme ;
- l’orgasme est le point culminant du plaisir. C’est un phénomène assez complexe qui a des effets sur ton corps (contraction du périnée notamment) et sur ton cerveau (tout un tas d’hormones sont libérées).
L’éjaculation et l’orgasme peuvent être liés. Mais pas toujours. Dans certains cas, il peut y avoir une éjaculation sans orgasme (anorgasmie). Parfois il peut y avoir un orgasme sans éjaculation (anéjaculation). D’autres fois l’éjaculation et l’orgasme coïncident. Il n’y a pas de règles et, surtout, ce n’est pas grave.
De temps en temps, l’anorgasmie ou l’anéjaculation peuvent être mal vécues lorsque ce sont des phénomènes récurrents. Il est alors important d’aller voir un·e professionnel·le de santé si ce problème perdure et qu’il t’affecte. Un article entier est dédié aux troubles sexuels des personnes à pénis.
Vaginal·e ou clitoridien·ne ?
Le plaisir des personnes à vulves a longtemps été mis de côté. L’orgasme des personnes ayant un vagin était divisé en deux équipes : l’orgasme vaginal et l’orgasme clitoridien. Et cela, grâce à ce bon vieux Freud qui a associé l’orgasme clitoridien a un plaisir enfantin tandis que l’orgasme vaginal était associé au plaisir de l’adulte. Et ce mythe a persisté jusqu’à… aujourd’hui ! C’est comme cela que tu as peut-être déjà entendu cette fameuse question « tu es vaginal·e ou clitoridien·ne toi ?«
Refaisons un peu d’anatomie : le clitoris est un organe entièrement dédié au plaisir dont on ne voit qu’une petite partie.
La partie externe (le gland) est ce que nous associons d’emblée au clitoris. Mais ce dernier s’étend en interne, autour de l’entrée vaginale et de l’urètre. Donc lorsqu’une personne jouit par pénétration seule (ce qui est rare rappelons-le), c’est probablement parce que la partie interne de son clitoris a été stimulée. Il n’y a donc, techniquement, que des orgasmes clitoridiens.
La question serait plutôt de savoir si tu préfères une stimulation interne ou externe de ton clitoris !
Les personnes à pénis ne peuvent pas simuler
Contrairement aux idées reçues, la simulation n’est pas l’apanage des personnes à vulves. La simulation est le fait de faire semblant d’avoir un orgasme. Les personnes à pénis peuvent également simuler : un bon jeu d’acteur, un peu d’adresse et hop le tour est joué ! A cela peut s’ajouter le fait que la personne peut émettre beaucoup de liquide pré-séminal. Ce liquide est sécrété lorsqu’il y a une excitation sexuelle, avant une éjaculation, et il ressemble de loin à du sperme. Ou alors, la personne peut également prétendre avoir eu une anéjaculation, le fait de jouir sans éjaculer.
Nous simulons pour diverses raisons : aider l’autre à finir, abréger un rapport sexuel ou encore rassurer saon partenaire. Ce n’est ni bien ni mal de simuler lorsque ça ne se reproduit pas à chaque rapport. En simulant, nous ne pouvons pas aider notre partenaire à nous faire plaisir. Parfois, lorsque nous sommes fatigué·e·s par exemple, nous choisissons de simuler pour ne pas vexer notre partenaire et le·la faire jouir quand même.
Un manque de lubrification est un manque de désir
Un autre mythe à faire voler en éclat est celui qui dit que si la personne ne mouille pas, c’est qu’elle n’est pas excitée et qu’elle n’a pas envie de faire l’amour. Il faut séparer le phénomène physique (la lubrification) du phénomène psychique (le désir sexuel). Généralement, la lubrification augmente lorsque nous avons envie de faire l’amour. Mais ce n’est pas toujours le cas. Déjà, nous lubrifions tous·tes de manière différente : chez certaines personnes, ce sera les chutes du Niagara et chez d’autres le désert de Gobi. Et surtout, la lubrification peut être influencée par de nombreuses choses :
- une grossesse et un accouchement ;
- une infection ;
- la prise de certains médicaments ;
- un déséquilibre hormonal ;
- le stress et la fatigue ;
- une surconsommation de drogue ou d’alcool ;
- un nettoyage de la vulve trop agressif ;
- etc.
Il faut donc décorréler la lubrification et le désir, parce qu’ils ne sont pas forcément liés. Si tu te rends compte que taon partenaire ne lubrifie pas (ou peu), demande-lui s’iel a toujours envie de faire l’amour. Et si c’est le cas, il ne faut pas lésiner sur le lubrifiant !
Les personnes à vulves n’ont pas de pannes sexuelles
Si nous te disons « panne sexuelle« , tu vas probablement penser à un pénis qui bande mou. Alors oui, mais pas que(ue) ! En réalité, les pannes sexuelles peuvent arriver à tout le monde, peu importe ce que tu as entre les jambes. Voilà quelques exemples de ce à quoi peut ressembler une panne :
- être sur le point d’avoir un orgasme mais ne pas y arriver ;
- perdre son excitation d’un coup alors que tu avais très envie de faire l’amour ;
- ne pas être assez détendu·e alors que le désir est là ;
- faire l’amour (à soi-même ou avec quelqu’un d’autre) mais ne pas être dans l’instant ;
- avoir envie de tout arrêter pour faire un câlin tout en étant excité·e.
Tu remarqueras que tout cela peut s’appliquer à n’importe qui. Que tu aies un pénis ou une vulve, les pannes sexuelles, ça arrive et ce n’est pas grave. Et Camille du compte Instagram @jemenbatsleclito en parle très bien dans l’une de ses publication.
Le sexe est le ciment du couple
Ce mythe est couplé avec l’injonction disant qu’un couple heureux devrait faire l’amour autant de fois en autant de temps. La sexualité au sein d’un couple peut être effectivement très importante et avoir une place centrale pour l’ensemble des partenaires. Et parfois, pas du tout ! Ce n’est pas parce qu’un couple ne fait pas l’amour qu’il va mal. Pensons, par exemple, aux personnes asexuelles en couple : iels n’ont pas besoin de faire l’amour pour être dans un couple sain, qui les satisfasse et qui dure.
C’est à chacun·e de se demander les choses qui sont importantes pour ellui dans un couple. Et il y a forcément plusieurs éléments qui rentrent dans nos attentes du couple. Cela peut être l’intimité, la complicité, le partage des valeurs, des ambitions qui concordent, la famille ou la sexualité. Tout le monde a sa propre vision du couple et c’est parfaitement normal.
Il y a des bons et des mauvais coups au lit
Interro surprise : c’est quoi être un bon coup exactement ? Vraiment, prends 30 secondes : c’est quoi la définition du « bon coup » et, par extension, du « mauvais coup » ? Si tu poses la question à tes potes, taon partenaire ou un·e inconnu·e dans la rue, il y a fort à parier que vos définitions ne seront pas les mêmes. Tout simplement parce que nous n’aimons pas les mêmes choses sexuellement. Le « mauvais coup » d’une personne sera peut-être le « bon coup » de quelqu’un d’autre. Il n’y a pas des bons ou de mauvais coups à proprement dit : c’est un mythe ! Tout dépend de l’alchimie entre les partenaires.
Il faut du temps pour connaître quelqu’un : ce qu’iel aime, ce qui lui fait perdre la tête, ce qui l’emmènera jusqu’à l’orgasme… C’est rare de trouver une personne ayant exactement les mêmes envies et pratiques sexuelles, qui fera les choses de la manière que tu aimes. C’est normal que ça prenne du temps. A partir du moment où les deux partenaires font attention au plaisir de l’autre et sont en capacité de communiquer sur leurs envies, c’est une affaire qui roule !
Les personnes en couple ne se masturbent pas
Derrière ce cliché se cache un mythe sur la sexualité qui dit que notre partenaire de vie devrait nous satisfaire et nous suffire au lit. Faisons le parallèle avec la nourriture. Prenons l’exemple du riz : tu peux adorer le risotto, avec une tonne de parmesan. Mais ça ne t’empêche pas d’aimer le riz sauté ou en sushi ou avec une sauce. Ce sont juste des manières différentes de le manger et tu as parfois envie de l’un et pas de l’autre. La sexualité c’est la même chose : tu peux adorer faire l’amour avec taon partenaire et apprécier les moments solo à te masturber. Ce sont juste deux manières différentes de prendre du plaisir. Ce n’est ni une tromperie ni la preuve que taon partenaire ne te satisfait pas.
Donc si tu as envie de te masturber et que tu as un·e amant·e, il n’y a rien de bizarre. Si taon partenaire se masturbe, ça ne te remet pas en cause. Et si ni l’un·e ni l’autres n’avez envie de vous masturber et que vous préférez faire l’amour ensemble, c’est OK. Finalement, chacun·e fait comme il a envie lorsqu’il s’agit de prendre du plaisir. Du moment que tout le monde est d’accord et que ça ne dérange pas l’autre, il n’y a pas de problèmes.
Seul·e·s les célibataires ont des sextoys
Derrière ce mythe sur la sexualité se cache souvent la peur d’être remplacé·e par un sextoy. Et aussi parfois l’idée qu’un·e célibataire est forcément insatisfait·e de sa vie sexuelle. Tout d’abord, il faut savoir que la majorité des sextoys vendus sont achetés par des personnes en couple, et non par des célibataires. Donc, visiblement, il n’y a pas que les célibataires qui ont des sextoys…
Ensuite, concernant la peur sous-jacente d’être remplacé·e par un sextoy, sache que rien ne pourra jamais remplacer les interactions humaines dans la sexualité. Les sensations d’un sextoy et d’une sexualité avec quelqu’un sont deux choses totalement différentes. C’est un peu comme la voiture : elle nous permet d’aller d’un point A à un point B, mais elle n’a pas fait disparaître le vélo ou les transports en commun ou nos pieds et nos jambes. C’est juste un moyen différent d’arriver à nos fins. Les sextoys sont un peu la voiture de la sexualité : ils nous permettent parfois d’arriver à notre objectif plus vite (ou pas).
Ces mythes, clichés et fausses idées peuvent avoir un impact plus ou moins forts sur notre sexualité. Parce que nous nous comparons souvent à ce que nous avons entendu. Et que nous réfléchissons à ce qui « acceptable » en matière de sexualité. Cela peut générer des complexes ou des tensions avec un·e partenaire. Et surtout cela n’aide pas à avoir une sexualité qui nous convienne si nous essayons de nous conformer à quelque chose. La « bonne sexualité » c’est celle dans laquelle tu te sens bien et avec laquelle tu es à l’aise. Point final.