Nous vivons une époque formidable où nous commençons enfin à parler ouvertement de masturbation. Où nous osons nous dire que la masturbation est saine. Que tu la pratiques seul·e ou pas. Que tu sois célibataire ou non. Cependant, elle est encore inégalitaire. Pour beaucoup, la masturbation dite masculine (donc des pénis) est vue comme normale alors que celle dite féminine (des vulves) est un peu plus taboue. La masturbation est aussi victime de clichés : non, elle n’est pas réservée aux célibataires et non, tu n’es pas obligé·e d’aimer ça.


Parlons masturbation

Le mot masturbation apparaît au 16ième siècle dans les Essais de Montaigne. Dérivé du latin masturbari, signifiant "pratiquer l'onanisme", qui est l'ensemble des pratiques sexuelles permettant d'atteindre l'orgasme (hors pénétration)

La masturbation est un acte sexuel à part entière. Au sens large, il s’agit de la stimulation d’une zone érogène, souvent jusqu’à l’orgasme.

L’histoire de la masturbation est assez révélatrice de la manière dont nous la percevons aujourd’hui. Avant le 19ème siècle, la masturbation était vue comme quelque chose de naturel. Dans le pire des cas, on la tournait en dérision mais c’est tout !

À partir du 19ème siècle, les scientifiques se rendent compte que la masturbation ne favorise pas la reproduction. A ce moment-là, l’Église décrète donc que cette pratique est contre-nature et la condamne ! Qui n’a jamais entendu que la masturbation rendait sourd·e ?! Mais il n’y avait pas que ça : la masturbation pouvait (soi-disant) rendre malade. Les « traitements » mis en place sont à la hauteur de cette maladie horrible : entraves des parties génitales, des mains ou des jambes, bains froids répétés, etc. La médecine et l’Église mènent donc une guerre à la masturbation. Nous ne sommes pas censé·e·s nous donner du plaisir ni avoir de pratiques sexuelles qui ne sont pas destinées à la reproduction. Les vieux clichés ayant la peau dure, la masturbation reste taboue pour certaines personnes.

Quelques chiffres

Selon une étude de l’Ifop, datant de 2019, 95% des personnes à pénis déclarent s’être déjà masturbées au moins une fois au cours de leur vie contre 76% des personnes à vulves. Ces chiffres ont beaucoup évolué depuis 1970 (date de la première étude présentée), montrant une ouverture d’esprit accrue sur le sujet. Cela veut aussi dire que 5% et 24% des personnes à pénis et à vulves ne se sont jamais masturbées. Pourquoi une telle différence entre pénis et vulves ? Pourquoi certaines personnes trouvent normal de se masturber et d’autres non ?

Cela dépend beaucoup de notre manière de choisir ce qui est normal ou non. Nous définissons la normalité en fonction de cinq paramètres :

  • culturel : l’environnement culturel et social dans lequel nous nous construisons et évoluons peut influer sur nos perceptions. Par exemple, dans certaines populations, la masturbation est vue comme bénéfique et est quotidienne (en Polynésie Française, chez les Marquisiens). Dans d’autres (chez les Kouma en Nouvelle-Guinée), la masturbation est punie ;
  • moral : nous pouvons être influencé·e·s par la religion, puisque la plupart des religions ne cautionnent pas les pratiques sexuelles qui ne permettent pas d’avoir d’enfants. Mais nous pouvons aussi être influencé·e·s par les valeurs inculquées par notre famille ;
  • clinique : la médecine a rabâché pendant des années que la masturbation pouvait rendre malade les pratiquant·e·s. Ces stéréotypes sont parfois résistants à l’évolution des idées : le fameux « ça rend sourd » par exemple ;
  • statistique : se rendre compte que nous ne sommes pas seul·e à nous masturber est rassurant (ou non) ;
  • personnel : en lien avec la liberté que nous nous accordons et la personnalité de chacun·e.

Bref, la question de la masturbation n’est pas si simple. Et chacun·e voit midi à sa porte (expression sortie de derrière les fagots). Certaines personnes aiment se masturber, d’autres non. D’autres n’en ressentent pas le besoin/désir. D’autres encore aimeraient mais n’osent pas.


Il existe plusieurs masturbations…

Si tu aimes la masturbation, il y a plusieurs moyens de te masturber : seul·e ou non, avec des jouets ou pas, jusqu’à l’orgasme ou juste prendre un moment pour toi. Quelque soit ta manière de ta masturber et tes envies, n’oublies jamais que c’est toujours meilleur quand ça glisse ! Alors utilise du lubrifiant pour tes caresses (qu’elles soient prodiguées sur ton corps ou celui de taon complice). Le lubrifiant va permettre une masturbation plus fluide, moins brusque, donc plus agréable et va augmenter tes sensations.

Le plaisir solitaire

Quand on parle de masturbation, on pense souvent au plaisir solitaire, dans un lit. Un petit quickie solo pour arriver à l’orgasme. La masturbation seul·e est une bonne manière de connaître son corps, ses sensations et ce qui nous fait du bien. L’objectif de la masturbation n’a pas à être forcément l’orgasme. Cela peut être de prendre du temps pour soi, comme on prendrait un bain pour se détendre ou qu’on irait se faire masser.

Tu peux évidement stimuler tes parties génitales avec ta main/tes doigts. Tu sais mieux que nous comment te stimuler pour te faire du bien, nous te laissons faire. La masturbation solo peut aussi te permettre d’essayer de nouveaux types de stimulation : avec des sextoys par exemple, si tu te sens à l’aise. Il en existe de différentes formes et tailles, vibrants ou non.

Si les jouets ce n’est pas ton truc ou si tu n’oses pas sauter le pas, tu peux essayer de stimuler d’autres zones érogènes. Il n’y a pas que tes parties génitales qui peuvent être stimulées et t’apporter du plaisir. Tu peux stimuler toutes les zones érogènes externes pour te procurer du plaisir.

Tu peux prendre tout autant de plaisir à stimuler tes fesses ou tes tétons que tes parties génitales ! Explore ton corps pour savoir quels endroits sont plaisants à caresser.

Le plaisir solitaire mais à plusieurs

Comme beaucoup de pratiques sexuelles, la masturbation peut se faire à plusieurs. Tu as plusieurs solutions si ça te tente de partager ta masturbation avec taon (tes) partenaire(s) :

  • Chacun.e se masturbe soi-même, devant l’autre ou l’un·e à côté de l’autre. Cela peut avoir un pouvoir excitant assez incroyable de voir saon partenaire se faire du bien. Vous pouvez vous faire plaisir jusqu’à l’orgasme ensemble mais chacun·e de son côté. Ou alors cette séance de masturbation peut déraper sur ce qui vous fait envie.
  • Vous vous masturbez mutuellement : faites-vous un câlin, caressez-vous le corps et les parties génitales. Se masturber mutuellement en étant enlacé·e·s va renforcer votre intimité et votre complicité. N’hésites pas à guider taon partenaire dans ses caresses.

Si vous êtes tous·tes les deux à l’aise, vous pouvez introduire l’utilisation de sextoys dans votre masturbation à deux. Le principe est le même qu’une masturbation manuelle. Sois à l’écoute de ton ressenti et de celui de taon amant·e pour que chacun·e puisse profiter au maximum.


Alors, on se masturbe ou non ? Et bien… Tout dépend de toi ! Tu as le droit de ne pas être à l’aise avec la masturbation. Tu as le droit de ne pas aimer te masturber ou de ne pas en ressentir le besoin. Ce n’est pas la peine de te forcer, sous prétexte que « tout le monde se masturbe« . Si tu es à l’aise et que tu aimes ça, il y a plusieurs possibilités qui s’offrent à toi. Seul·e, avec taon (tes) partenaire(s), avec ou sans sextoys. Ta seule limite est ton imagination et tes envies, comme pour toutes pratiques sexuelles.

Si tu aimes te masturber avec quelqu’un d’autre, ça ne veut pas dire non plus que tu te sens à l’aise avec tout le monde pour partager cette pratique. Ou que tu as envie d’une masturbation partagée à chaque moment intime. Il y a des moments et des personnes avec qui tu apprécieras plus que d’autres de te masturber. Écoute tes envies et celles de taon partenaire.

Sources :

https://www.cnrtl.fr/etymologie/masturbation

https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2009/revue-medicale-suisse-204/la-medecine-pour-et-contre-la-masturbation

Étude Ifop pour ELLE réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 28 au 29 janvier 2019 auprès d’un échantillon de 1 007 femmes, représentatif de la population féminine âgée de 18 ans et plus résidant en France métropolitaine.

Tremblay, Réjean, et al. Guide d’éducation à la sexualité humaine, à l’usage des professionnels. Accompagnement à la vie affective et sexuelle, un droit tout au long de la vie : enfants, adolescents, adultes, séniors, personnes en situation de handicap. Érès, 2020

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