Tellement de clichés gravitent autour de la sodomie ! Ce serait douloureux, sale, contre-nature, avilissant et la personne receveuse serait forcément passive. Il est temps de donner un coup de pied au cul des clichés sur les plaisirs anaux : ça ne doit pas faire mal, ce n’est pas forcément sale, ça ne veut rien dire sur ton orientation sexuelle et tu peux être actif·ve si tu es receveur·euse.
Petite histoire de la sodomie
L’origine du mot sodomie est biblique. Littéralement ! La ville de Sodome est cité dans la Genèse (premier livre de la Bible), en association avec Gomorrhe. Ces deux villes sont décrites comme des lieux de débauche sexuelle et se seraient attirées les foudres de Dieu, qui les aurait alors détruites. Sodome et Gomorrhe ont-elles réellement existé ? Le mystère reste entier mais le mot sodomie dérive bel et bien du nom d’une ville biblique.
La sodomie est pratiquée depuis l’Antiquité. Et elle n’avait rien à voir avec l’orientation sexuelle ! Et si nous te faisions un mini cours d’histoire de la sodomie ? Nous allons parler en termes binaires (hommes/femmes, garçons/filles) dans le paragraphe suivant. La source de ce mini cours d’histoire est tirée du livre Le mythe de la virilité d’Olivia Gazalé (que nous te conseillons vivement car il est très intéressant). Attention, les prochains paragraphes vont parler d’actes violents, non consentis, et pédophiles. Tu n’es pas obligé·e de lire si tu ne le souhaites pas, passes directement à la prochaine partie de cet article.
Dans la Grèce Antique, l’intégration des jeunes garçons dans la société passe par… la pénétration anale. Jusqu’à l’âge de 17-18 ans, les jeunes hommes suivent un parcours d’apprentissage militaire et citoyen où ils sont mentorés par un homme d’âge mûr. Les Grecs pensaient que, pour devenir viril, il fallait que le jeune homme reçoive la précieuse semence de son « bienfaiteur » par ses deux orifices naturels : la bouche et l’anus. Il y avait donc régulièrement des relations sexuelles anales entre le garçon et son mentor. A cette époque, le terme « orientation sexuelle » n’existe pas dans la langue grecque donc l’homosexualité (telle que nous la définissons aujourd’hui) n’a aucun sens.
Tout ce qui importe, c’est le pouvoir sexuel, c’est-à-dire les rôles de chacun (pénétré ou pénétrant). Tout cela faisait partie de l’éducation reçue par les jeunes garçons destinés à être des hommes. Des vrais. Des virils. Pour devenir « un homme viril », il fallait se faire pénétrer !
Nous retrouvons la même tendance à pratiquer la sodomie chez les Romains. A la différence qu’ils ne pouvaient prendre comme amants que leurs jeunes esclaves prépubères. Cela avait pour unique but de contenter sexuellement les maîtres, sans cette notion de sperme virilisant. Seules les relations sexuelles anales avec des esclaves étaient autorisées. Pratiquer la sodomie avec un autre homme non asservi était condamnable (encore une histoire de pouvoir sexuel).
Il va sans dire que ces actes sexuels étaient particulièrement violents et relevaient de la pédophilie. Mais retenons que les pratiques anales étaient largement répandues dans l’Antiquité, sans que cela ne remette en question une quelconque orientation sexuelle. Dans un cas, il s’agissait de viriliser un garçon et dans l’autre, il s’agissait du plaisir pris.
Ce qui se raconte par derrière
Nous l’avons dit en début d’article : de nombreux clichés tournent autour des pratiques anales. Nous en faisons le tour et t’expliquons pourquoi ces clichés devraient rester au placard.
Cliché #1 : la douleur
Se faire pénétrer l’anus serait douloureux… Sauf que, comme toute pratique sexuelle : si ça fait mal, c’est que c’est mal fait ! Que tu n’aimes pas la sensation procurée par une pénétration anale est une chose. Que tu aies mal en est une autre.
Tu peux prendre du plaisir avec une sodomie, tout simplement parce que l’anus et le rectum sont des zones particulièrement riches en terminaisons nerveuses. Il existe un nerf, le nerf pudendal, qui innerve le périnée et « relie » la région anale et les parties génitales (clitoris ou gland du pénis). Tu as déjà essayé de secouer une toile d’araignée à un endroit précis ? Tu vois comme la partie opposée de la toile vibre ? Le nerf pudendal fait la même chose si tu le stimules par l’anus : en stimulant l’anus et le rectum, tu peux stimuler l’autre extrémité du nerf, au niveau des parties génitales.
Cliché #2 : c’est sale
Alors, si tu entends sale au sens salissant parce que tes excréments sortent par ton anus… On ne va pas te mentir, il y a un petit risque d’avoir des résidus. Le rectum est la partie terminale du système digestif. Une fois tes aliments digérés, il faut les évacuer. Les selles sont stockées dans ce qu’on appelle l’ampoule rectale.
Lorsque celle-ci se remplit, c’est le moment où tu as envie d’aller aux toilettes. Mais si tu te retiens, les selles vont remonter dans le côlon, en attendant que tu puisses/veuilles aller aux toilettes. Si nous résumons : soit tu évacues les selles, soit elles retournent dans le côlon. Donc si tu décides d’insérer quelque chose dans ton rectum (un sex-toy adapté, un ou des doigts, un pénis), tu n’auras le risque que d’avoir des « résidus » puisque la muqueuse interne n’est pas lisse.
Il existe cependant des moyens simples pour limiter ces résidus :
- aller aux toilettes avant toute pratique anale ;
- faire un lavement anal (nous t’expliquons comment faire juste après).
Le lavement n’est ni nécessaire ni obligatoire et il n’est surtout pas à faire trop souvent, pour ne pas perturber ta flore anale.
Cliché #3 : l’orientation sexuelle du ou de la pénétré·e
Si la personne pénétrée a un pénis, cela présupposerait une orientation homosexuelle. Nous avons souvent vu des personnes se définissant comme des hommes hétérosexuels demander si ce n’était pas bizarre de vouloir tester l’anal, en tant que pénétrés. Cela les perturbait d’avoir envie d’explorer un plaisir qui les mettait en « situation d’infériorité« . Tu te souviens de cette histoire de pouvoir sexuel dont nous parlions en début d’article ? Nous en sommes en plein dedans ! Parce que, c’est bien connu, il n’y a que les personnes définies comme femmes ou homosexuelles qui se font pénétrer l’anus… Spoiler : c’est faux !
Une pratique n’a jamais défini l’orientation sexuelle de quiconque. Est-ce que faire la grasse matinée fait de toi un·e flemmard·e ? Non, ça veut juste dire que tu avais envie de dormir et de te reposer. Et bien, sache que se faire pénétrer l’anus ne veut rien dire sur ton orientation sexuelle. Ça veut juste dire que tu as envie de t’essayer à d’autres plaisirs. En plus, si tu as un pénis, cela veut aussi dire que tu as une prostate… Et tu as bien de la chance parce que tu peux atteindre l’orgasme avec ta prostate !
Cliché #4 : la passivité de la personne receveuse
Souvent, lorsqu’il y a pénétration, on s’imagine que la personne pénétrée est passive. Et c’est d’autant plus vrai dans le cadre d’une pénétration anale. Cette pratique serait synonyme de soumission de la personne receveuse. Peut-être parce qu’on s’imagine que seule la personne pénétrante prend du plaisir et donc la personne pénétrée ne s’adonnerait à cet acte que pour faire plaisir à saon partenaire ?
Déjà, comme nous l’expliquions dans le cliché #1, la région anale est très innervée. De plus, l’une des extrémités du nerf pudendal, longeant le rectum, atterrit au niveau des parties génitales. Donc la personne receveuse peut également prendre du plaisir. Enfin, il existe de multiples positions sexuelles permettant de prendre le contrôle d’une pénétration en tant que pénétré·e :
- l’andromaque : la personne pénétrée vient se positionner sur saon partenaire, en face à face ;
- l’andromaque inversée : même chose que l’andromaque mais la personne pénétrée est dos à saon partenaire ;
- la levrette : la personne pénétrante laisse faire les mouvements de va-et-vients (et profite du spectacle).
Généralement, toutes les positions sexuelles laissant à la personne pénétrée la place de faire des mouvements de bassin permettent de prendre le contrôle de la pénétration.
Cliché #5 : c’est contre-nature
Si contre-nature signifie qu’il n’y aura pas de possibilités de se reproduire, alors oui… Tu peux dire que la sodomie est contre-nature. Tout comme la fellation ou le cunnilingus ou le baiser ou les caresses. Est-ce que cela veut dire que toutes ces pratiques sont à exclure de notre sexualité ? Est-ce que la sexualité ne sert qu’à se reproduire ? Nous ne pensons pas… La sexualité, seul·e ou à plusieurs, est faite pour prendre du plaisir. Et le plaisir par le cul existe !
Comment faire une bonne sodomie ?
Pour une bonne sodomie, tu auras besoin :
- de beaucoup d’envie,
- d’énormément d’excitation,
- de temps à profusion,
- de lubrifiant à volonté,
- d’écoute (de soi et de l’autre si tu pratiques avec quelqu’un) en abondance.
Si cette liste ne t’a pas du tout aidé, c’est normal et nous te proposons de lire la suite.
Bien se préparer
Pense à aller à la selle avant (dans la journée), histoire de vider au maximum ton côlon et ton rectum. Tu peux aussi prendre une douche et nettoyer ton anus à l’eau claire, sans savon.
Si les résidus dont nous parlions dans le cliché #2 te freinent, tu as la possibilité de faire un lavement anal. Cela consiste à nettoyer l’ampoule rectale du maximum de résidus. Pour cela, tu auras besoin :
- D’une poire à lavement, que tu peux trouver à la pharmacie.
- D’eau claire tiède. Pas d’eau chaude ni de savon, tu risquerais de te brûler et de provoquer des lésions. L’eau froide n’est pas agréable : eau tiède on a dit ! Mets-toi dans ta douche, ce sera plus simple.
- D’un peu de lubrifiant.
- D’un cul (de préférence le tien).
Pas à pas
Prêt·e ? On y va !
- Remplis ta poire d’eau tiède.
- Mets un peu de lubrifiant sur l’embout de la poire et sur ton anus.
- Insère l’embout de la poire dans ton délicat fessier. En douceur, lentement, sans contracter. N’enfonce pas trop ta poire dans l’anus sinon c’est ton côlon que tu vas nettoyer (et ça va prendre du temps).
- Vide doucement l’intégralité du contenu de ta poire dans ton rectum.
- Laisse agir une dizaine de secondes avant d’évacuer l’eau. Soit dans ta douche soit dans tes toilettes. En espérant que tes toilettes soient dans ta salle de bain. Sinon tu vas te balader cul nu avec de l’eau dedans, en espérant ne pas jouer au Petit Poucet…
- Et on reprend depuis le premier point de cette liste jusqu’à ce que l’eau évacuée soit claire.
Le lavement anal n’est évidemment pas une obligation. Il n’est pas à répéter trop souvent non plus (pas plus de 2 fois par semaine) pour ne pas perturber ta flore anale.
Bien faire
Commence par te mettre dans un endroit et une position confortables, que tu sois seul·e ou avec un·e partenaire. Le processus est le même que tu pratiques l’anal en solo ou avec quelqu’un d’autre. La seule différence quand tu pratiques à deux (ou plus, on ne te juge pas), c’est qu’il faut se parler. Littéralement : parlez-vous ! Si tu es le·la pénétrante, assure toi que ce que tu fais à taon amant·e lui fait du bien. Si tu es le·la pénétré·e, n’hésites pas à dire à taon partenaire si c’est agréable ou non. Les premières fois peuvent être un peu chaotiques mais ça fait partie de l’apprentissage. Vous allez découvrir ensemble comment faire kiffer un cul et ça ira de mieux en mieux (promis).
Commence par des caresses, sur une zone assez large si tu as besoin d’y aller progressivement : le haut des cuisses, le bas du dos, les fesses… Et rapproche-toi tranquillement de l’anus, en prenant ton temps. En fonction de ce dont tu as envie et de ce que tu ressens. Reviens en arrière si tu n’es pas prêt·e : prends ton temps et ne te force pas.
Une fois arrivé·e à l’anus, n’hésites pas à mettre du lubrifiant pour te caresser, toujours en externe. La pire erreur que tu puisses faire à ce moment-là c’est de précipiter la pénétration (avec un doigt, un sex-toy ou un pénis) : si tu n’es pas assez détendu·e, ça va coincer et tu risques de te faire mal et de te blesser. Le maître mot c’est de prendre son temps. Et de mettre du lubrifiant aussi. Continue à masser l’anus (le tien ou celui de taon partenaire) doucement avec du lubrifiant, sans hésiter à rajouter. Il n’y a jamais trop de lubrifiant ! Au fur et à mesure du massage, les sphincters vont se détendre et l’anus va « s’ouvrir« . Le « trop plein » de lubrifiant remontera dans le canal anal, direction le rectum !
Tu n’es pas obligé d’utiliser uniquement tes doigts pour caresser l’anus de taon amant·e : la langue est une possibilité si ça vous tente.
Lorsque tu te sens prêt·e à tenter l’introduction de quelque chose (ou de quelqu’un) dans ton magnifique fessier, ajoute du lubrifiant. Nous te conseillons d’y aller progressivement : tente d’abord avec un doigt (l’auriculaire par exemple, c’est le plus petit). Puis continue le massage externe en même temps, ça va finir de détendre tes sphincters. Si tu sens que c’est désagréable, si tu as mal ou si tu n’as plus envie : arrête-toi, tu vas te faire mal et ce n’est pas le but. Une fois à l’aise avec un doigt, tu peux tenter la pénétration avec :
- plusieurs doigts,
- un sextoy adapté : un chapelet anal pour y aller progressivement, un plug anal ou un dildo,
- un pénis.
Ensuite… Et bien, nous te laissons kiffer ta sodomie ! En fonction de ce que tu aimes, de ce que tu ressens, de ce dont tu as envie. N’oublie pas de communiquer avec taon partenaire tout au long de l’expérience (si tu ne pratiques pas seul·e) et d’utiliser tout le lubrifiant que tu souhaites.
On ne s’introduit rien dans le cul qui ne soit pas adapté ! On oublie les légumes et autre objets non appropriés. Les sphincters sont des muscles très puissants. En se contractant, ils peuvent faire remonter dans ton côlon tout ce qui n’a pas une base plus large que l’objet. Utilise donc toujours un sextoy adapté aux pratiques anales, sous peine de te retrouver aux urgences au lieu du 7ème ciel.
Bien terminer
Lorsque tu souhaites arrêter la sodomie, retire le sextoy (ou la personne) aussi doucement que tu l’as introduit. Le retrait du jouet ou du pénis ou des doigts est tout aussi important, car il y a une possibilité de se faire mal (ou de faire mal). Tu peux remettre du lubrifiant si besoin.
Si le rapport sexuel n’est pas terminé (avec toi-même ou quelqu’un), il faut retenir qu’on ne passe pas (jamais !) d’une pénétration anale à un autre type de pénétration, buccale ou vaginale. Il faut d’abord nettoyer ce qui a servi à la sodomie. Egalement, on ne passe pas du fessier d’une personne à celui de quelqu’un d’autre. Si tu as utilisé un préservatif sur ton sextoy/pénis/doigt : change-le avant de passer à une autre pénétration. Si tu n’as pas utilisé de préservatif : nettoie correctement le sextoy/pénis/doigt. Et si tu as pratiqué du sexe (anal ou non d’ailleurs) en groupe et sans préservatif, n’oublie pas de te faire dépister ainsi que taon (tes) partenaire(s). Prenez soin de vous.
Si c’était ta première sodomie, prends le temps de réfléchir et d’exprimer ce que tu as le plus et le moins apprécié. Tu as le droit de ne pas avoir aimé et de ne pas vouloir recommencer. Mais si ça t’a plu, exprimer ce qui était chouette ou non te permettra de recommencer en toute sérénité et d’apprécier encore plus la fois suivante.
Tes sphincters ont été détendus (au sens physique du terme) suite à cette pénétration. Mais le corps étant bien fait, ils vont se resserrer tranquillement, tout seul, en quelques dizaines de minutes. Ce qui peut se passer suite à une pénétration anale :
- tu vas peut-être péter. Et oui, tu as fait entrer de l’air dans ton rectum avec les mouvements de va-et-vients… Il faut bien évacuer l’air emprisonné ;
- ton transit peut-être légèrement modifié pendant quelques heures. Mais pas d’inquiétudes, il va revenir à la normale.
Que dire pour conclure ? Qu’une pratique sexuelle n’a jamais défini qui tu étais ou ton orientation sexuelle. Comme n’importe quelle pratique, la sodomie peut apporter énormément de plaisir, quel que soit ton genre, ton sexe biologique ou ton orientation sexuelle. Cependant, n’oublions pas les règles d’hygiène et de santé sexuelle basiques. Changer de préservatif ou nettoyer ce qui a servi à la sodomie avant de passer à une autre pratique. Et surtout ne rien se mettre dans l’anus qui ne soit pas adapté.
Si tu n’as pas envie d’essayer ce type de pratique, ne te force pas. Si tu te demandes comment amener taon partenaire à pratiquer la sodomie : discutez-en ensemble. S’iel te dit « je n’ai pas envie de tester« , laisse tomber, il y a d’autres choses plaisantes dans la sexualité. Si tu as envie de tenter l’expérience anale, vas-y progressivement. Les premières fois peuvent prendre du temps mais si l’envie est réellement présente, tu y arriveras. Arme-toi de patience et d’un stock de lubrifiant. Et relis cet article autant de fois que nécessaire. Si tu es déjà pratiquant.e, nous n’avons pas grand chose à te dire de plus, à part de prendre soin de toi et de ton cul.
Sources :
Histoire de Sodome et Gomorrhe
Olivia Gazalé, Quatrième partie « La construction du mythe viril », Chapitre « La pédagogie pédérastique », dans Le mythe de la virilité, Paris, Editions Robert Laffont, 2017, pp. 262-273.